Insomnies

Balcon, Nouvelle-Orléans, avril 2011

Il est quinze heures, tes paupières tombent. Tu mets ça sur le compte du train, le sale train du matin qui part toujours un peu plus tôt, toujours un peu trop loin. Tu détends le noeud de la cravate pour mieux ravaler ton sommeil, tes doigts glissent sur le clavier et la caféine réussi à te sortir de ta torpeur.

À dix-neuf heures, tes yeux brûlent. Tu jettes ta valise dans un coin de la pièce et tu tombes tout habillé sur un matelas défoncé. Le corps a lâché, ton esprit vagabonde. C'est pas franchement une heure pour dormir mais bon.

Tu te réveilles en sursaut, la chemise froissée et les cheveux en vrac. Tu cherches vainement à distinguer les piaillements des oiseaux dehors, mais même en louchant sur les aiguilles rien n'y fait - il est minuit. Tu plies avec soin tes vêtements après avoir constaté qu'il est trop tard pour dîner. Tu enfouis ta tête sous la couette.

Un temps infini passe, pendant lequel tu te retournes mille fois. Tu as chaud, faim, et les yeux grand ouverts. À minuit vingt, tu te résous à regarder un film, de préférence un Godard ou un Chabrol histoire de vraiment forcer la main à ton horloge interne. Trois heures plus tard tu embrayes sur un que sais-je, sans grand résultat.

Tu t'écroules enfin alors que la lune songe à foutre le camp. Un battement d'ailes plus tard, ton réveil sonne. Tu enclenches l'auto-pilote en espérant que le monde n'y verra que du feu.

Il est quinze heures, tes paupières tombent. Garde les yeux ouverts. Garde les yeux ouverts. Garde les yeux ouverts.

PIL #92 Insomnies

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