S’il y a un genre musical qui résiste à mes assauts répétés pour l’amadouer, c’est le Blues. De longues heures à rouler de la Nouvelle Orléans à Memphis en écoutant Robert Johnson n’auront vraiment pas suffi à me faire assimiler les bases, ni accepter la rigueur de la guitare comme (quasi) seul instrument. Mais à en juger par l’influence du genre sur les musiciens, je m’y prends sûrement mal.
Les Black Keys, que vous avez déjà pu écouter au moins quatre fois si vous suivez mes playlists, puisent pas mal dans le registre du Blues. Et dans le garage rock, mais n’allons pas plus vite que leur musique. Si j’en juge par leur influence sur les groupes produits ces dix dernières années, je ne suis pas le seul à me prendre des baffes à chacun de leurs nouveaux albums. Je mets leur duo (Dan Auerbach/Patrick Carney) à peu près au même niveau que Josh Homme, Dave Grohl, Trent Reznor et Maynard Keenan - ce qui nous fait un sacré podium. Tous ont en commun une véritable passion pour la musique, et s’ouvrent volontiers à des genres a priori très loin du leur.
Fin 2009 par exemple, les Black Keys commencent à enregistrer avec le rappeur Jim Jones, pour voir. Au milieu de l’enregistrement, Mos Def débarque dans le studio et trouve ça chouette. Il rejoint donc le projet. Au final un album prend forme, avec la participation de RZA (du Wu-Tang Clan), de Nicole Wray, Ludacris et Q-Tip notamment. Ça s’appellera Blakroc, et ça me donnera quelques frissons.
À côté de ça, ils restent très attachés au Blues et s’impliquent pour faire connaître de nouveaux groupes. Après un des concerts de Radio Moscow dans le Colorado, par exemple, Dan Auerback va voir le groupe, chope leur démo et les met en contact avec leur futur label. Quatre albums plus tard on est bien content du résultat. Dans la même veine, les Black Keys vont produire les Black Diamond Heavies. Patrick Carney aime tellement ça qu’il joue sur quelques morceaux de leur album.
Quand le leader des Black Diamond Heavies - John Wesley Myers - décide de sortir un album, il est produit par Jim Diamond. Solitary Pleasure sort en 2011, et on y sent là encore la nette influence du Blues, tout en tendant davantage vers le Garage Rock. Sans surprise d’ailleurs, puisque Jim Diamond est aussi celui qui a produit les deux premiers albums des White Stripes qui ont contribué à faire renaître le genre.
Un peu plus loin, le groupe anglais 22-20s part aussi du Blues mais aura un véritable déclic en écoutant les White Stripes, justement. Et, suivant un chemin similaire, les Greenhornes contribueront également au revival du Garage rock. Deux des membres rejoindront ensuite Jack White (des White Stripes, donc) pour former les Raconteurs - le monde est décidément petit.
Mais tout n’est pas qu’une histoire d’amitiés ou d’influences. Les Band of Skulls par exemple, se débrouillent très bien pour revivifier le Garage rock en y insérant, eux aussi, de petites touches de Blues. Ils ont certes fait la première partie des Dead Weather (Jack White, toujours), mais le rapprochement s’arrête là. D’autres encore s’en tiennent à un seul style et assument, me faisant presque mentir quand je dis ne pas réussir à apprécier le Blues: Black Joe Lewis et Left Lane Cruiser s’y engouffrent franchement, et c’est plaisant.
Comme souvent en musique donc, tout n’est pas noir ou blanc. Je termine avec The Heavy, qui n’ont rien à voir avec le blues et qui sont signés chez Ninja Tunes, un de mes labels préférés. Aucun lien donc, et pourtant la chanson qui commence cette playlist aurait toute sa place sur un album des Black Keys.
PIL#144 Black, White and a Touch of Blues
- The Heavy - What Makes a Good Man?
- Black Joe Lewis - You Been Lyin’
- Blakroc - Why Can’t I Forget Him
- Radio Moscow - Frustrating Sound
- Band of Skulls - I Know What I Am
- Left Lane Cruiser - Wash It
- Dan Auerbach - Heartbroken, In Disrepair
- Black Diamond Heavies - Solid Gold
- 22-20s - Latest Heartbreak
- The Greenhornes - There Is an End