Koi no Mega Lover

Vigeland Park, Oslo, décembre 2007

Le sauvage est un gentil garçon. Un peu virulent par moment – il mange régulièrement du troll au petit déjeuner – mais fondamentalement attaché à la paix dans le monde. S’il était né très jolie fille, on l’aurait probablement inscrit au concours Miss France, mais voilà il est arrivé au monde dans le corps et avec l’esprit d’un mâle. Pour compenser un peu et essayer de faire en sorte que l’univers soit un peu plus juste, il adhère à des principes féministes et égalitaristes que beaucoup jugent extrêmes.

Ce type de prise de position est toujours un peu délicat à assumer en face d’une troupe de mâles alcoolisés, mais c’est le genre de lutte de tous les instants qui lui plaisent particulièrement ; il ne croit pas aux causes perdues d’avance, et c’est probablement pour ça qu’il défend le logiciel libre avec les ongles et les dents. Bref, tout sauvage qu’il est et malgré la présence d’auvergnats au gouvernement, il croit fondamentalement en l’humain.

Évidemment ca n’est pas sans lui poser de problèmes. Tenez par exemple, en primaire déjà. Ses deux meilleurs amis étaient de vraies têtes brûlées : ils grimpaient aux arbres alors que c’était interdit, avaient une collection de petites voitures impressionnante, et couraient plus vite que lui. Pour le reste des gens cela dit, il était absolument inconcevable que ce soient ses copains : ils s’appelaient Sarah et Esther.

Aujourd’hui, si vous lui demandez de vous parler des gens qu’il a rencontrés le soir précédent, il se souviendra très probablement de leurs goûts musicaux, de la couleur et la longueur de leurs de cheveux, de leur métier, et de leurs chaussures. Il a d’ailleurs une théorie personnelle sur le fétichisme du pied, selon laquelle les grands timides sont plus susceptibles que les autres de tomber dans les affres de cette délicate perversion.

Ce dont il sera parfaitement infoutu en revanche, c’est de vous dire si la fille avec qui il a débattu quatre heures pour savoir lequel de Mercurial ou de git était le mieux foutu fait du 95C ou du 85A (en dessous de ça généralement, elle vous le fait remarquer d’office, histoire de mettre derrière elle ce qu’elle estime lui manquer devant). C’est pas que ça ne l’intéresse pas dans l’absolu, juste que dans le contexte, c’était hors sujet.

Et pourtant hier à une heure trente-sept, en revenant de déjeuner, au lieu de se dire comme tous les jours: “sweet, it’s 1337 o’ clock”, son regard a accroché une paire de fesses rebondies, constaté la présence d’un string plutôt que d’une culotte, remonté le dos jusqu’à la nuque découverte, s’est perdu deux secondes dans l’onde de cheveux remontés en un vague chignon avant de se détourner pour mieux plonger dans un décolleté parsemé de tâches de rousseur.

Soixante secondes plus tard, le gentil garçon a finalement réussi à dompter le sauvage et dirigé ses yeux vers les pieds du décolleté. Talons de quinze centimètres, chaussures noires à semelle rouge. Gnnn. Fixant la moquette tachetée jusqu’à son bureau, il a ensuite descendu un grand verre d’eau fraîche. Au moment de choisir sa playlist, il a cliqué sur la première chose qui lui soit passé par la tête.

Maximum the hormones.

Commentaires

1. Le lundi, septembre 14 2009, 09:29 par NiKoB

Tombé dans le piège des Louboutin… Paraît que c’est redoutable ;)