Levés aux aurores (huit heures du matin, c'est inhumain), on petit déjeune à la guest house. On file ensuite vers les ruines de la vieille ville d'Ayutthaya, histoire d'en profiter un peu avant que le soleil ne nous transforme en homards. On commence doucement en faisant une longue promenade sur le site du Wat Phra Sri Sanphet, suivie de la visite d'un temple moderne histoire de nous rafraîchir. On regarde de loin le Wat Phra Ram en regrettant de ne pas pouvoir y mettre les pieds, et on traverse les jardins de l'ancien palais royal. On joue à Indiana Jones dans les ruines du Wat Mahathat, où une tête de Bouddha s'est faite emprisonner dans les racines d'un arbre. Morts de soifs, on s'arrête acheter de l'eau et des éventails, dont il ne subsistera plus rien quelques heures plus tard.
On finit notre visite avec le Wat Ratchaburana, que je parcours de long en large avec mon appareil photo et l'opéra de Carl Orff en boucle dans la tête (c'est très agaçant quand ça arrive). Il nous faut quelques longues minutes en plein cagnard avant de nous réorienter et de trouver un taxi qui nous dépose en ville. On flâne entre les étals d'un petit marché, avant de filer dans une banque climatisée (bonheur) pour retirer un peu d'argent. Retour à la guest house, élue meilleur restaurant du coin. On s'installe peinards au bord du fleuve et on dévore.
L'après-midi est maintenant bien entamée, et on part pour la gare où on s'achète des billets de train extrêmement chers pour Bangkok (20 bahts, soient 50 centimes d'euro). À ce prix là évidemment, on voyage debout en troisième classe, mais il n'y a pas grand chose qui puisse entamer notre bonne humeur. On arrive à la gare de Bangkok quelques heures plus tard, et au moment où on met le pied à terre tout le monde se fige. Les hauts parleurs de la gare entonnent l'hymne national, et tout le monde observe un silence religieux. Il ne nous reste plus qu'à attendre le train suivant - celui qui doit nous conduire dans la jungle.
Comme on est un peu en avance, je vais m'acheter des brochettes et des saucisses fourrées au fromage, histoire de ne mourir ni bête ni de faim. Les autres me regardent bizarrement, visiblement il est inconcevable que je sois encore capable d'avaler un truc sans exploser. Ils vont néanmoins se chercher un café frappé quelques minutes plus tard. L'heure arrive de monter dans le train, et cette fois on est en classe grand luxe. Le contrôleur nous apporte le menu, devant lequel on salive copieusement. Il nous propose de la bière, qu'on accepte, et il arrive avec un sceau rempli de glaçons et 3.5L de Singha. Avec les canettes qu'on avait achetées en prévision du voyage, on devrait avoir de quoi voir venir. Quand le repas arrive on lui fait une petite place dans nos estomacs respectifs et l'univers se dilate un peu plus.
La bière et la fatigue font assez vite leur oeuvre, et on part dans des discussions improbables sur fond de Tryo - c'est du roots :
- Ce qui est bien, c'est qu'on n'a pas de rail de notre côté
- On n'a pas de rail, mais on a de la pop...
- Ouais et pas de rail, pas de chocolat
- Plus on est de de fous, moins y'a de rails
- Si on était à cheval, on serait montés sur du rail-selle
- Vous croyez qu'on aura un bol de rail au petit déjeuner ?
Le contrôleur passe nous demander si on veut encore de la bière, et on refuse poliment dans un anglais imbibé. F. et L. vont fumer une dernière cigarette à l'arrière du wagon ; je les rejoins en me tenant aux parois et constate qu'on roule toutes portes ouvertes. Je grimpe ensuite dans ma couchette, tire le rideau avant de m'endormir, bercé par le vrombissement régulier d'un ventilateur.