septembre 2009

mercredi, septembre 30 2009

Funkalicious

Boule à facettes géante, Oslo, décembre 2007

Cette semaine on change les disques et on fait un bisou à Lisbei, parce que sans elle vous n’auriez peut-être pas de playlist aujourd’hui.

Zéro fureur, point de bourdon et à bas l’élitisme : on s’habille d’un sourire et d’un patte d’eph et on laisse tout son corps entrer en résonance avec les lignes de basse. Goûtez-moi donc ce son… mmmmh, funkalicious!

(psst; faut cliquer sur les petites flèches si t’as pas spotify)

dimanche, septembre 27 2009

Thirteen

Fresque du monument soviétique de Treptower Park, Berlin, décembre 2006

Quand j’ai ouvert les yeux, le monde avait changé.
Au milieu du mois d’août, je crois qu’il a neigé.
Il n’y avait plus personne aux terrasses des cafés
Et tous les magasins étaient fermés.
On aurait dit la guerre, ou bien un jour férié
Sans repas de famille et sans électricité.
Il n’y avait rien à faire
Et rien n’a été fait
Il n’y avait rien à faire
Incroyable mais vrai.

J’ignore la date exacte. C’aurait été difficile de toute façon ; tout s’est passé au milieu d’un brouillard indéfinissable. Dès le départ je pouvais dire exactement comment et avec qui ça allait se finir, mais il m’a fallu attendre quelques mois pour oser en parler. Quand l’automne est arrivé, le rideau était déjà tombé. J’ai fêté mon anniversaire dans un village allemand, avec pour seul horizon le mur de ma chambre d’hôtel.

Je me revois ensuite flotter complètement à côté de mes pompes, en plein mois de décembre. M’avalant film sur film sur film au cinéma de Boulogne. Refaisant ma garde-robe et essayant tant bien que mal de garder un semblant d’entrain en société. Et puis je me rappelle de cette soirée à l’assassin, où entouré de trois d’entre elles je me suis senti vraiment bien pour la première fois depuis longtemps.

Il y a eu Noël, au milieu d’une série de fuites en avant. Il y a eu le réveillon, et lui qui m’a sauvé la vie. Et puis il y eu cette inconnue qui m’a remis d’aplomb, un peu. C’était la première que j’embrassais, et c’était doux. C’était la dernière, aussi, mais c’est la vie. A la fin du mois de janvier il a neigé et je buvais du café.

Mars, avril, mai, juin, juillet, août et c’est déjà septembre. Le rideau s’ouvre, et les feuilles tombent.

Quand j’ai ouvert les yeux, le monde avait changé.
Au milieu du mois d’août, zéro degré.
Il y avait un grand feu dans la rue d’à-côté,
Apparemment les gens voulaient se réchauffer.
Penser à autre chose
Parler un peu de tout
Parler un peu c’est bien
Et ça ne gâche rien.

mercredi, septembre 23 2009

The Bristol Sound

Parking lot, Calgary, BC, Canada, janvier 2007

1995. Avec un an de retard, Portishead débarque dans ma lointaine caverne et Glory box tourne en boucle sur toutes les bonnes radios. Comme à peu près la moitié de la planète, ça me prend au tripes et je casse ma tirelire pour acheter l’album. N’ayant accès ni à Internet ni à un magazine de musique digne de ce nom, j’ignore tout de la mouvance trip-hop et je referme la parenthèse musicale en écoutant Smash en boucle.

1996, mon pote Antoine, toujours en avance sur l’âge des cavernes, me fait écouter Hell Is Round the Corner et me garantit qu’on n’a pas fini d’entendre parler de Tricky. Je hurle au scandale : mais qu’est-ce que c’est que cette reprise toute moche, on ne peut pas décemment rapper sur Portishead. Je boycotte donc et continue d’ignorer non seulement l’existence d’un genre musical entier, mais également l’immense contribution d’Isaac Hayes au genre en question.

1997, le même Antoine réitère avec Tricky et achète Pre-Millenium Tension, parce qu’il aime bien la pochette (ce qui est une façon tout à fait valide de découvrir de chouettes groupes, mais qui vous fera passer à côté de tous les albums de Zone Libre). Je me paie copieusement sa tête, mais comme il l’a encodé en mp3 je lui demande de me le graver sur un CD. 150 minutes plus tard (à l’époque on n’avait pas de Burn-Proof et on gravait en 1x), j’étais secrètement très heureux.

2000, une fille me fait découvrir Morcheeba et je tombe instantanément amoureux. Deux semaines et un regrettable malentendu plus tard (elle: je peux dormir chez toi ce soir? J’habite un peu loin et il est déjà 15h… / moi: pas de problème je vais crécher chez mon voisin t’en fais pas.), je plongeais corps, âme et déprime dans les bacs de mon disquaire préféré et achetais à peu près tout ce qui était, à tort ou à raison, étiqueté The Bristol Sound.

There is a crack in everything,
That’s how the light gets in.

lundi, septembre 21 2009

Unrelated

Wir wollen mehr ferien (nous voulons plus de vacances), Walldorf, Allemagne, septembre 2009

Une rame de métro blindée
Une forte odeur de cannabis en haut des escaliers
Un gars, une fille, bisous je file
Un bar vide, un cuistot barré
Une faim tenace, une foutue soif de vivre
De la musique de l’âge de pierre
Un pub plein de potes et de diagonales perdues
Des noms qui commencent tous en M, mais pas tous en fait
Des chips au vinaigre, des Big Mac façon triple Whopper
De bons conseils, une bière pour faire couler ça
Une autre, une autre, une autre, des sourires, des taxis
Des plans de quartier qui refusent de descendre
Ca va chez vous, trop belle la vie ?
Ben c’est pas la joie, elle dort chez Sophie
Les deux pieds dedans, pas fait exprès
Un type sur le trottoir, qui dégobille
Une porte rose, un code à taper
Toujours le cannabis, dans l’escalier

Un téléphone qui sonne trop tôt
Un marteleur entre les tempes
Des viennoiseries, un Red Bull, puis deux
C’est où déjà ton poissonnier?
Un métro vide, deux digicodes, pas changés
Un gars, une fille, un gars, une fille, des ailes et des p’tits monstres
Un thé, un scalp, un gros bâtard et Shosanna
Sacré bout d’fille, nan tu trouves pas ?
Deux heures d’allemand, c’est où chez toi ?
Un peu plus loin, et dix bouquins, pour presque rien
Un bar, un autre, une piqûre de moustique en pleine rue
De la mangue, de la coco, de la coriandre
Et une bière pour faire couler tout ça,
Lille-Paris sans soucis, mais on dort où le troisième soir ?
Une autre bière et des sourires, des rues qui défilent et des étages
La tour Eiffel, putain, et Montmartre, et le canal, où on se noie
Allez dégage connard, et rabats-toi
Priorité à droite, fille de gauche, la balle au centre
Mais ça seraient pas les voisins qui s’rentrent ?
Qu’il est beau ce chat, viens jouer avec moi,
Sois sympa, mords-moi les doigts

Un téléphone qui sonne encore,
Café, douche, café, télé,
Ségolène chie sur Paris, Paris qui file,
What is it? Easy like Sunday morning,
Des œufs brouillés, un peu comme eux
Un gars, une fille, une fille, un gars, une fille, et moi
Des hiragana, des katakana, et des cookies au chocolat
Une pyramide, pas un compas,
mais bon y’a l’œil alors ça va
Faudrait qu’on y aille, et un coca !
Marchons, marchons, la république attendra
Cannabis, cannabis, chuis au premier
Une grosse valoche, un court weekend
Time of my life, fenêtres ouvertes,
She’s like the wind, pied au plancher, sur les pavés
Overload sous le périph’, y’a plus d’BP
Une sieste pour faire passer
On se voit à sept heures, à huit, après
Un digicode qu’a bien changé
On s’fait des sushis? Allez Ok.
Mais qu’il est bête ce chat,
Lache donc ça, ça s’mange pas
Qui donc que v’là, c’est la smala !
Italien ? Ouais pourquoi pas.
Pizza, carpaccio, antipasti
Plat du soir et plein de truffe noire
Michou, Mike Brant, Eros Ramazzotti
Perdu deux tailles, futal sur les chevilles
Regard torturé, ça la tiraille
Joli tablettes faites au marqueur,
j’resterais bien encore une heure
Bon allez les p’tits gars, je file

Un téléphone, qui ne sonne pas,
Pas fermé l’œil, toujours comme ça
Un café, une douche, un café,
Un verre d’eau, un câlin au chat
Espèce de con tu m’manques déjà
Une ruelle sombre, relents de pisse
Ça sent l’cramé, épave, Renault 10
Et un clodo qui hurle des insanités
Je serre les dents, j’ai l’air féroce
Je fixe mon ombre, personne derrière
Traverse au rouge, dans la nuit jaune
Tape sur une caisse arrêtée au hasard
Sur le passage piéton.

Des poils de chat, des noirs des blancs
Une odeur de clope froide qui s’accroche à mon sac
Une gommette bleue collée à ma veste
Voilà la gare, voilà ma gare
Je saute dans le train, il est à l’heure.
Téléphone, il est sept plombes
Y’a un message sur mon répondeur
Roulé en boule, la gueule en quart
J’ai froid, je tremble, j’veux pas partir
Trente-trois onze, une page se tourne,
Changement de pays, changement de décor
Vendredi, mon patron est mort

mercredi, septembre 16 2009

Make it a double!

Double dose, Walldorf, septembre 2009

C’est moi ou on est mercredi aujourd’hui ? Bon alors, cette semaine je vous ai préparé une petite décoction à base de groupes que j’ai découverts dans les douze derniers mois. Je sais je sais, je suis du genre un poil à la bourre ; la semaine dernière j’ai découvert New Model Army, c’est vous dire.

Bref. Comme j’ai souvent du mal à choisir la chanson, ce coup-ci je vous en ai mis deux. Ça n’a pas nécessairement été plus simple (si ça ne tenait qu’à moi, je vous collerais les albums en entier à chaque fois), mais c’était bien fun.

Et puis ça m’a un peu rappelé cette merveilleuse émission radio, Stop ou encore, où t’avais pas besoin d’attendre minuit pour crier more more more et dont le présentateur était un peu l’idole d’une génération. Tiens je vous ai déjà dit que Billy est une marque de capotes en Allemagne ? Visiblement c’est comme ça qu’ils appellent leur truc. Un peu comme nous avec Paul quoi. Sauf que bon, Billy c’était pas un apôtre.

Allez trève de bêtises, c’est parti mon Billy. Et ce soir quand vous boirez un coup pour oublier l’été et mes vannes pourries, make it a double!

Hey bartender hit me with a double
And introduce me to that girl with the bubble

vendredi, septembre 11 2009

Koi no Mega Lover

Vigeland Park, Oslo, décembre 2007

Le sauvage est un gentil garçon. Un peu virulent par moment – il mange régulièrement du troll au petit déjeuner – mais fondamentalement attaché à la paix dans le monde. S’il était né très jolie fille, on l’aurait probablement inscrit au concours Miss France, mais voilà il est arrivé au monde dans le corps et avec l’esprit d’un mâle. Pour compenser un peu et essayer de faire en sorte que l’univers soit un peu plus juste, il adhère à des principes féministes et égalitaristes que beaucoup jugent extrêmes.

Ce type de prise de position est toujours un peu délicat à assumer en face d’une troupe de mâles alcoolisés, mais c’est le genre de lutte de tous les instants qui lui plaisent particulièrement ; il ne croit pas aux causes perdues d’avance, et c’est probablement pour ça qu’il défend le logiciel libre avec les ongles et les dents. Bref, tout sauvage qu’il est et malgré la présence d’auvergnats au gouvernement, il croit fondamentalement en l’humain.

Évidemment ca n’est pas sans lui poser de problèmes. Tenez par exemple, en primaire déjà. Ses deux meilleurs amis étaient de vraies têtes brûlées : ils grimpaient aux arbres alors que c’était interdit, avaient une collection de petites voitures impressionnante, et couraient plus vite que lui. Pour le reste des gens cela dit, il était absolument inconcevable que ce soient ses copains : ils s’appelaient Sarah et Esther.

Aujourd’hui, si vous lui demandez de vous parler des gens qu’il a rencontrés le soir précédent, il se souviendra très probablement de leurs goûts musicaux, de la couleur et la longueur de leurs de cheveux, de leur métier, et de leurs chaussures. Il a d’ailleurs une théorie personnelle sur le fétichisme du pied, selon laquelle les grands timides sont plus susceptibles que les autres de tomber dans les affres de cette délicate perversion.

Ce dont il sera parfaitement infoutu en revanche, c’est de vous dire si la fille avec qui il a débattu quatre heures pour savoir lequel de Mercurial ou de git était le mieux foutu fait du 95C ou du 85A (en dessous de ça généralement, elle vous le fait remarquer d’office, histoire de mettre derrière elle ce qu’elle estime lui manquer devant). C’est pas que ça ne l’intéresse pas dans l’absolu, juste que dans le contexte, c’était hors sujet.

Et pourtant hier à une heure trente-sept, en revenant de déjeuner, au lieu de se dire comme tous les jours: “sweet, it’s 1337 o’ clock”, son regard a accroché une paire de fesses rebondies, constaté la présence d’un string plutôt que d’une culotte, remonté le dos jusqu’à la nuque découverte, s’est perdu deux secondes dans l’onde de cheveux remontés en un vague chignon avant de se détourner pour mieux plonger dans un décolleté parsemé de tâches de rousseur.

Soixante secondes plus tard, le gentil garçon a finalement réussi à dompter le sauvage et dirigé ses yeux vers les pieds du décolleté. Talons de quinze centimètres, chaussures noires à semelle rouge. Gnnn. Fixant la moquette tachetée jusqu’à son bureau, il a ensuite descendu un grand verre d’eau fraîche. Au moment de choisir sa playlist, il a cliqué sur la première chose qui lui soit passé par la tête.

Maximum the hormones.

mercredi, septembre 9 2009

Stalker!

Mike Patton, Rock en Seine, Paris, août 2009

Aujourd’hui nous étudierons un phénomène de société plutôt répandu : le stalking. Également appelé harcèlement chez mes compatriotes, sauf qu’ils parlent quand même de stalker parce que harceleur c’est nul comme mot. C’est un peu comme si on essayait de traduire brownie, vous voyez. Ou retaliation.

Bref, toujours est-il que dans un univers parallèle au mien, il doit être considéré comme mignon de harceler les gens. Pendant des mois. Du coup, si tu ne t’arrêtes pas je vais te planter un tournevis entre les deux yeux devient probablement une charmante preuve d’affection, et tourner le dos au gens avec un petit air exaspéré constitue le summum de l’érotisme, ainsi qu’une invitation à rouler une pelle.

Visiblement dans cet univers là, les parents suivent les préceptes de Dolto à la lettre, et leurs enfants tendent naturellement à prendre le refus pour un signe d’intérêt, le désintérêt pour un signe d’affection et un hochement de tête pour une demande en mariage.

Du coup, j’imagine qu’un simple sourire peut leur déclencher des orgasmes multiples, et en un sens je les envie un peu (remarquez moi je peux pisser debout) (la belle affaire que voilà) (entre parenthèses).

Tout ça serait absolument fascinant et sans conséquence si nous n’étions qu’observateurs neutres de ce monde extérieur biaisé. La réalité, malheureusement, c’est qu’on est obligés d’ajouter d’horribles mots à la langue française pour décrire notre gêne. Avouez, c’est juste gonflant.

Bref, rôdeurs de tout poil, celle-là vous est dédicacée : Stalker!

If I speak at one constant volume
At one constant pitch
At one consonant rhythm right into your ear
You still won’t hear!
You still won’t hear…

vendredi, septembre 4 2009

Insomniaque

Insomniaque, alcoolique, allumé, Berlin, septembre 2009

Il est deux heures, ou cinq ou huit
Petit matin, après-midi,
Déjà moins dix, un temps pourri
Le ciel dégueule, orage, minuit.
T’entends ce boxon?

Malback, Cognac, sa race, patraque
Le bide en vrac tu vides ton sac
Rue saint Sulpice, le poing levé
Et trop bien élevé-e pour hurler
Tu montes le son.

Tu vois plus rien, foutue chaleur
Tu bois plus rien, p’t’être tout à l’heure
Concentre-toi sur les morceaux
Ceux qui te restent sous la peau
Allez sois pas con.

Café, clope, un p’tit chien noir
Ta gueule défaite dans le miroir
Pas fermé l’œil, ça va se voir
Et faudra t’nir jusqu’à ce soir
Ouais mais bon.

Dormir, jamais, pas qu’ça à faire
Dormir, jamais, mais ouais, t’aimerais
Dormir, jamais, ça sert à rien
Dormir, jamais, dormir, putain
Oui mais non.

(Clin d’oeil à un jeune poète)

mercredi, septembre 2 2009

North by Northwest

Seattle, juillet 2007

C'était en 2006, j'étais encore relativement jeune et je travaillais pour l'empire du mal, pas très loin de Seattle. Un weekend, bien décidé à laisser le boulot derrière moi, je suis allé faire un tour au musée de la science-fiction et je me suis pris une grosse baffe. J'y ai passé des heures, notant mentalement tous les livres que je devais absolument lire, tous les auteurs que je devais impérativement ajouter à ma bibliothèque, et tout le temps que j'allais devoir consacrer à combler mes lacunes et rattraper le retard. Trois ans plus tard, la liste n'a fait que s'allonger, malgré de longues soirées passées à bouquiner dans les coins les plus perdus d'Europe.

En sortant, je voulais me changer un peu les idées. Je suis donc allé faire un tour juste à côté, à l'EMP -- une espèce de musée vivant de la musique. Et derechef, je me suis pris une jolie claque. Le sens de l'univers venait de m'être révélé : Atlantic Records, Jimi Hendrix, le grunge sous toutes ses formes, des tonnes de groupes indie -- j'étais dans une capitale mondiale de la musique et je marchais dans les pas de mes groupes préférés. À l'étage j'ai hésité à massacrer Foxy Lady sur les guitares en libre accès, et refusé de m'infliger la honte de ma vie en tentant de jouer de la batterie.

La journée ainsi bien entamée, j'ai mangé en bord de mer en écoutant Queensrÿche donner la réplique aux marchands de poisson, halluciné devant le monorail, rempli une carte SD de photos ratées et bu des coups dans des petits cafés où on jouait du jazz toute la nuit.

Sur la route du retour, en quittant l'interstate 5 pour Portage Bay, je me suis dit que malgré ses 360 jours de pluie par an, cette ville avait un côté magique.

(Téléportation imminente, suivez le cap North by Northwest)

-- Et avec tout ça, t'as toujours pas vu Singles ?!
-- Nope.