Promis, ça ne sortira pas d'Internet

mercredi, janvier 5 2011

Volutes

Volutes de fumée d'encens, Paris, janvier 2011

Melun, Valence, Bordeaux, Brest, Savigny sur Orge, Bois-d'Arcy, Berne, quelque chose comme Paris, et Brest encore. Un court voyage auditif dans le paysage francophone, neuf titres dont les notes s'envolent dans mon salon. Et en guise de conclusion, un dixième d'anglais joliment accompagné, depuis Bruxelles.

PIL #76 Volutes

jeudi, décembre 30 2010

The line begins to blur

Campagne allemande vue de l'ICE, novembre 2010

There are things that I said I would never do
There are fears that I cannot believe have come true
For my soul is too sick and too little and too late
And my self I have grown to weary to hate

The more I stay in here
The more it's not so clear
The more I stay in here
The more I disappear
As far as I have gone
I knew what side I'm on
But now I'm not so sure
The line begins to blur

Is there somebody on top of me?
I don't know I don't know
Isn't anybody stopping me?
I don't know I don't know
Well I'm trying to hold my breath
I don't know I don't know
Just how far down can I go?
I don't know I don't know I don't know

As I lie here and stare
The fabric starts to tear
It's far beyond repair
And I don't really care
As far as I have gone
I knew what side I'm on
But now I'm not so sure
The line begins to blur

mercredi, décembre 15 2010

Welcome to the Jungle

Jungle tropicale, Thaïlande, octobre 2009

'Just because General fucking Levy gets a single in the top ten, and some art-school wankers starts writing about Jungle, and the next thing you know anything with a backbeat's "Jungle." Even Everything But The fucking Girl!' She folded her arms. 'Everything But The Girl aren't Jungle, alright?'

He nodded. It was clear he had never heard of Everything But The Girl.

She closed her eyes and bit back a grin. 'Right. There's a lot going on in Jungle: there's intelligent Jungle, there's Hardstep, Techstepping, Jazz Jungle... I like 'em all, but I can't cut Hardstep tracks. All the darkness edges. You want Hardstep, go to Ed Rush or Skyscraper or something, Ok? I cut tunes more like Bukem, DJ Rap, stuff like that.' Natasha was enjoying herself enormously, lecturing him, watching his eyes dart frantically around. He had no idea what she was talking about.

China Miéville - King Rat

PIL #73 Welcome to the Jungle

mercredi, décembre 8 2010

November gone

Feuilles d'automne, Paris, novembre 2010

Il a filé déjà, le rustre, et j'ai à peine eu le temps de profiter de lui. Il avait l'air paisible, vu de ma fenêtre. Il a dû trouver que je le prenais un peu de haut, c'est probablement pour ça qu'il s'est montré si frais.

J'aurais voulu garder quelques souvenirs de lui, mais il s'est barré un mercredi ; j'étais avec Frau H. en train de converser difficilement quand ça m'est tombé dessus. Ça m'a un peu agacé, j'en ai tapé du pied dans un canapé. J'aurais aussi bien pu glisser, vu le temps qu'il fait.

J'ai envie de passer un moment avec lui ce soir mais le vent l'a emporté bien loin, je ne suis pas prêt d'en revoir les couleurs. Je souffle doucement sur le givre qui couvre la vitre en attendant que l'hiver passe.

PIL #72 November gone

mercredi, décembre 1 2010

Wild, Twisted and Fascinating

La Défense, Paris, décembre 2008

Avec tout ce qu'il tombe comme neige cette semaine, le nom de cette playlist est plus qu'adapté.

(Et si après deux secondes de Mambo Kurt vous avez envie de me tuer au nom du bon goût, cliquez simplement sur suivant. Mais vous raterez quelque chose.)

PIL #71 Wild, Twisted and Fascinating

mercredi, novembre 24 2010

manu manu militari

Pistolet à eau, unrelated #20, Paris, novembre 2010

Feu d'artifice en acier
Qu'il est charmant cet éclairage
Artifice d'artificier
Mêler quelque grâce au courage

Deux fusants
Rose éclatement
Comme deux seins que l'on dégrafe
Tendent leurs bouts insolemment
IL SUT AIMER
Quelle épitaphe

Un poète dans la forêt
Regarde avec indifférence
Son revolver au cran d'arrêt
Des roses mourir d'espérance

Il songe aux roses de Saadi
Et soudain sa tête se penche
Car une rose lui redit
La molle courbe d'une hanche

L'air est plein d'un terrible alcool
Filtré des étoiles mi-closes
Les obus caressent le mol
Parfum nocturne où tu reposes
Mortification des roses

Guillaume Apollinaire - Fête

PIL #70 manu manu militari

mercredi, novembre 17 2010

More, more, more!

Publicité pour la Sparkasse, Berlin, mai 2007

Je me demande ce que je vais bien pouvoir préparer comme playlist cette semaine tiens... Ce qu'il me faudrait ça serait un thème hyper original. Voyons voir... le crépi ? Non, trop mainstream. Le reggae ? Ah ouais mais non, il me faut de la musique quand même. La société rurale du XIIe siècle ? Ah je tiens un truc là je sens. Mmmh, que ferait miss France à ma place ?

PIL #69 More, more, more!

mercredi, novembre 10 2010

Inspire

Rheinfelden, Suisse, juillet 2009

J'ai beau consacrer un gros paquet de temps à mon éducation musicale, je tombe toujours un peu des nues quand j'entends certains vieux morceaux. Et je me sens souvent un peu bête, tel le gamin qui assimile Verdi à une publicité pour du jambon. Voilà donc une mini-compilation à destination des honnêtes gens, histoire de remettre quelques pendules à l'heure.

PIL #68 Inspire

Oh et comme ça n'est pas toujours très simple de savoir exactement où je veux en venir, je vous ai préparé une playlist bonus alternant l'original et la repompe - assumée ou non. Elle contient aussi deux paires de morceaux en plus, parce que je fais ce qu'il me plait non mais :
PIL #68bis Inspired/Expired

mercredi, novembre 3 2010

Back to Basics

Bretagne, août 2010

Retour à la normale, l'interconnexion musicale est rétablie. Et avec un peu de chance ils auront résolu leurs problèmes de playlist chez Spotify.

PIL #67 Back to Basics

mercredi, octobre 27 2010

Trick or Treat

Tortue de terre au bord de l'eau, Bangkok, novembre 2009

Cette semaine on fête Halloween avec la 66ème playlist. J'aurais pu vous ressortir le bonus de la 58ème, Metalhead 66, mais ça n'aurait pas eu grand chose de terrifiant : depuis Steve Estatov et Evanescence, le métal c'est grave mainstream.

Donc à la place des grosses guitares saturées, je vous ai mis quelques violons et beaucoup de piano. Et des Russes, des Allemands et des Français, parce qu'ils font toujours très peur dans les films américains.

PIL #66 And the Band Played Waltzing Matilda

vendredi, octobre 22 2010

Khao Sok 22

Khao Sok, Thaïlande, octobre 2009

Au réveil, tout va un peu mieux ; la tente a résisté aux attaques des mini-monstres suceurs de sang, la pluie n'est qu'un mauvais souvenir, et il y a du café et des tartines grillées. On décide malgré tout de rentrer doucement vers la raft-house, en prenant le temps de regarder la jungle qu'on a traversée le jour d'avant en fixant nos pieds. On est d'autant meilleure humeur que les sangsues semblent avoir quasiment disparu de la surface de la terre ; quand on en voit une, on se fout de sa gueule et on la crâme au briquet par pur sadisme.

On s'arrête près d'un large bras de rivière pour déjeuner, et on en profite pour paresser au soleil, se baigner et se laver un peu. Nopporn nous sort le grand jeu et fait le pitre une fois de plus. On rit de bon coeur. Le chasseur-cueilleur hawaïen nous a préparé des nouilles lyophilisées et ça nous semble le summum du raffinement, accompagné d'un peu de curry de fougère. Un observateur neutre penserait probablement qu'on est sous l'influence d'une drogue euphorisante.

Khao Sok, Thaïlande, octobre 2009

De retour sur la raft house on nous annonce qu'un poisson-chat géant du Mékong a été péché pendant notre absence. On demande une définition de géant, et on n'est pas déçus : ce n'est pas un poisson, c'est un monstre. On s'interroge sur la légalité d'une telle prise dans une réserve naturelle protégée, mais ça n'a l'air d'inquiéter que nous. Du coup, on repasse en mode touriste et on se dore la pilule sur les planches nouvellement posées de la désormais confortable terrasse .

En fin d'après midi, on reprend le bateau dans l'espoir d'apercevoir les gibbons moqueurs qu'on entend depuis le début du séjour. On verra des tas d'oiseaux, des singes pas franchement effrayés et des poissons multicolores. On se gavera les yeux avec le paysage, essayant d'imaginer la dense végétation sous l'eau, qui reprendra ses droits d'ici quelques semaines après la décrue et dont on ne voit que la cime des arbres qui dépasse. Et on usera nos pellicules virtuelles sur le coucher de soleil, qui à lui seul mérite un séjour ici. Mais on ne verra aucun gibbon.

Khao Sok, Thaïlande, octobre 2009

Après le dîner, Nopporn a demandé à la vieille femme qui nous a accompagnés avec la famille de nous raconter son histoire. Mais finalement c'est lui qui nous raconte un bout de sa vie, et on découvre qu'il a créé plusieurs entreprises et brassé des sommes astronomiques (en bahts, ce qui relativise un peu). C'est un peu dramatique de l'entendre ainsi nous expliquer qu'il s'est fait plumer à chaque fois, mais il y met tellement de sourires et de bonne humeur qu'on se marre avec lui. On lui raconte alors un peu nos métiers à nous, la vie en Europe - autant de choses qu'il a déjà dû entendre cent fois mais auxquelles il prête une attention sincère.

Une légère brume se lève sur le lac et d'invisibles macaques gloussent dans la nuit. On souffle doucement sur nos cafés en souhaitant que le temps ralentisse un peu. On est bien là.

jeudi, octobre 21 2010

Khao Sok 21

Jungle de Khao Sok, Thailande, octobre 2009

Ce matin, départ en long-tail boat. Il fait très beau, les gibbons rigolent au loin et un aigle nous suit pendant quelques instants. On est tous survoltés à l'idée de ce trek en pleine jungle tropicale, et ça n'est probablement pas à cause du café soluble qu'on descend comme si c'était de l'eau sucrée. J'ai mis mes plus beaux habits dans mon sac à dos, en particulier un magnifique treilli de chasseur au couleurs chatoyantes. On arrive assez vite à destination, et on s'enfonce dans la dense végétation en suivant Nopporn et son guide, que j'appellerai ici le chasseur cueilleur hawaïen et dont le métier consiste entre-autres à sillonner le parc national pour lutter contre le braconnage.

Au départ tout se passe bien. On est attentifs aux traces d'animaux, on marche calmement, et on se glisse pas mal dans la peau de notre personnage d'aventurier téméraire. On a remonté nos chaussettes jusqu'aux genoux histoire de garder la classe en toute circonstance, et on chanterait presque il en faut peu pour être heureux (mais on a tous oublié notre culotte orange). On remarque à peine qu'au sol, des dizaines de petits organismes semblent attirés par nos chaussures et se mettent en branle dès qu'on approche.

Jungle de Khao Sok, Thailande, octobre 2009

Et puis il se met à pleuvoir. La nature mouillée prend vie, c'est très joli. Mais les petits organismes au sol grouillent désormais : ce sont des sangsues, et elles s'attaquent à nos mollets. Commence alors une chasse sans merci ; d'une pichenette on en éloigne une qui est presque arrivée au dessus de la chaussette, tandis qu'on en fait sauter une autre du bout d'un bâton. On prend soin les uns des autres, on scrute nos pieds respectifs, la guerre est déclarée. On arrive au bord d'une rivière, qu'on entreprend de traverser ; on a de l'eau jusqu'à la poitrine et on doit porter nos sacs et tout le bardas de camping à bout de bras. Sur l'autre rive, le chasseur-cueilleur hawaïen nous prévient que les sangsues vont désormais grouiller, et que si on n'aime pas ça il va falloir prendre des mesures radicales.

On s'asperge donc d'anti-moustique (qui par effet de bord, fait fuir les sangsues et fondre le plastique) et d'une décoction à base de café et de tabac. Les premiers tests sont concluant, les sales bestioles font grave la tronche et descendent de nos pompes dès qu'elles y ont touché un peu trop longtemps. On reprend notre exploration, toujours un poil paranoïaques malgré tout. La pluie cesse, mais on doit de nouveau traverser la rivière ; l'anti-moustique a beau être redoutable, les eaux ne s'ouvrent pas devant nous et il fuit nos chaussures. Les hostilités reprennent, la bataille des sangsues fait rage. Au bout d'une heure, on décide que ça va bien, qu'après tout ce ne sont que des sales bêtes inoffensives, et on se laisse tranquillement dévorer. Sauf F. qui ne lâche rien et refuse le don du sang.

Jungle de Khao Sok, Thailande, octobre 2009

On fait une pause au soleil, sur un petit îlot de rochers. Nopporn nous propose de nous débarrasser des sangsues qui se seraient accrochées malgré notre vigilance, et on s'exécute. Je n'ai rien sur les jambes, tout va bien. F. saigne un peu, L. a l'âme guerrière et est en pleine hémorragie, et P. s'en sort à peine mieux. Par acquis de conscience, je sonde le reste de mon corps, et découvre avec horreur deux sales bêtes gorgées de sang dans... mon boxer. Bien. Parfait. Panique, psychose - la raison me quitte. Impossible de penser à autre chose désormais, la jungle est devenue mon enfer personnel.

Un peu plus tard, un peu moins loin que prévu, on monte le camp. On est épuisés, physiquement et psychologiquement. Il se remet à pleuvoir, on fait une sieste pendant que nos guides vont à la pêche pour le dîner. On se réveille quand le jour commence à tomber et on discute en cramant des sangsues au briquet, recroquevillés au milieu d'une bâche étalée entre nos tentes. On nous sert la nourriture dans une vaisselle éphémère, mi-plastique mi-bambou, et malgré la tension et la fatigue on s'émerveille. Au menu : poisson grillé, sauce au piment, curry de fougère et riz - c'est délicieux. On convient avec Nopporn qu'il serait préférable pour notre santé mentale de ne passer que deux jours dans la jungle au lieu des trois prévus, et on se couche en espérant très fort que la tente saura résister aux assauts de l'armée des sangsues.

mercredi, octobre 20 2010

Khao Sok 20

Surat Thani, Thailande, octobre 2009

Réveil à 5 heures par le contrôleur, qui nous apporte un jus d'orange sucré. Suivi d'un petit déjeuner complet, qu'on prend à la sauvage sur la table de P. et L. Le jour se lève et on prend le frais par la fenêtre entre-ouverte. Il me faut bien cinq minutes avant que mon cerveau ne percute, mais je finis par me jeter sur mon appareil photo pour aller immortaliser le décor de rêve qui défile. Les portes du train sont toujours ouvertes, je m'asseois sur la margelle pour embrasser le plus possible le paysage. Une petite voix me traite de fou dangereux, mais tout est tellement parfait...

On arrive à Surat Thani à l'heure. Mathilde, une expatriée française qui organise notre séjour dans la jungle, nous a lancé un défi : trouver le bon autocar, et arriver au point de rendez-vous sans accroc. À la gare, on a encore une fois du mal à passer inaperçus avec nos gros sacs et nos têtes de farangs, et on se fait démarcher par tous les Thais qu'on croise - ils nous proposent tous la même chose : nous emmener au bon endroit pour quelques centaines de bahts. Mais on est têtus et on file droit vers l'arrêt de bus. Une fois qu'on est à peu près sûrs de notre coup on se présente au conducteur, qui vire deux moines pour nous permettre de monter. En vérité, on ne sait pas bien si on va où il faut ni si on va arriver à se faire comprendre, mais on est en route et il est trop tard pour changer d'avis.

Par je ne sais quel miracle, on nous signale notre arrêt et on arrive à l'heure dans un patelin au milieu de nulle part, coupé par la route et groupé autour d'un 7-eleven et d'un petit marché frais. En attendant Mathilde et Nopporn, notre guide, je vais acheter quelques boissons énergétiques pour tenter de rester éveillé. Quand ils arrivent, Mathilde nous offre des pâtisseries à base de coco et de banane qu'elle vient d'acheter sur le marché. Les autres font les présentations pendant que je zone dans un état second, et on saute dans le pick-up direction le parc national de Khao Sok.

Khao Sok, Thailande, octobre 2009

On change alors de moyen de transport pour traverser le lac. Au moment de monter dans le long-tail boat, je manque de le faire chavirer et je sauve mon sac de la noyade de justesse. Il est désormais évident que j'ai un putain de pied marin. On embarque une famille Thai avec nous, et on se dit que tiens, on n'est pas les seuls touristes. Deux heures et demie plus tard, on en a pris plein la vue. Ceux dont la peau y arrive encore ont entretenu leur bronzage, les autres ont vidé leur tube de crème solaire. Et on se rend compte qu'en définitive, la famille qui nous a accompagnés va être à nos petits soins pendant 5 jours. Notre demeure sur le lac est constituée de maisons flottantes dont une partie est maintenant sous l'eau, le niveau étant inhabituellement haut. Des ouvriers sont en train de clouer une terrasse de fortune pour nous, et se lanceront ensuite dans la restauration complète des lieux. En attendant, le silence est impressionnant et la jungle nous appelle déjà. Pour patienter, P., L. et F. piquent une tête dans le lac.

Quant à moi, je vais me changer d'abord. Je passe sur la terre ferme en empruntant un passage fait de planches en bois vaguement clouées les unes aux autres. L'eau est claire et fourmille de jolis poissons colorés. J'accélère un peu le pas, les poissons c'est pas trop mon truc. J'enfile rapidement mon maillot de bain et, mes fringues sous le bras, je retourne sur la raft-house par le même chemin. À mi-parcours, une planche cède sous mes pas et je me retrouve à battre furieusement des pieds pour garder ma tête, mes fringues et mon téléphone portable hors de l'eau. Je me dis que j'ai vraiment dû trop manger, et aussi que j'ai un super mauvais karma. Je devrais nourrir plus les poissons, mais je vais éviter de donner de ma personne directement quand même. Je regagne les planches, et Nopporn s'approche, un peu inquiet. Tout va bien, je me suis juste ouvert un peu le pied mais j'ai sauvé ce qui devait l'être. Il me désinfecte et me met un pansement, avant de gentiment se foutre de ma gueule.

- C'est la deuxième fois que tu fais un truc clumsy aujourd'hui. Je vais t'appeler Feufah.
- Mais! C'est pas de ma faute là, le truc a lâché sous moi !
- Feufah, en Thai, ça veut dire maladroit. Il en faut toujours un dans le groupe, et maintenant, c'est toi. Hé hé.
- Feufah ! Feufah ! - les autres sont sortis de l'eau et valident instantanément ce nouveau sobriquet.

Khao Sok, Thailande, octobre 2009

Pour le déjeuner, notre famille d'accueil nous a préparé un en-cas copieux, mais n'a mis aucun piment. Nopporn s'approche avec son plat et commence à nous en décrire le contenu. F. le regarde, lui demande si c'est du nam prik, et il écarquille les yeux. Quand P. et F. lui expliquent qu'ils cuisinent et qu'ils aiment beaucoup la nourriture Thai, il nous propose de goûter ; on se jette dessus comme des crevards, c'est délicieux. Nopporn n'a pas l'air d'en croire ses yeux et appelle les autres, qui se plantent derrière nous et commencent à discuter entre eux. Il est ensuite convenu qu'à partir de maintenant, on mangera comme eux ; visiblement ils sont impressionnés. Soit ils jouent tous très bien la comédie, soit on risque de morfler ce soir au dîner. Peut-être un peu des deux.

On fait une petite sieste là-dessus, pendant laquelle je me fais bouffer par une bête. Vu les piqûres, on dirait une araignée. Je passe ça sous silence dans l'espoir vain que tout le monde aura oublié mon nouveau surnom, mais en sortant de la case les ouvriers préviennent Nopporn que Feufah est réveillé. Non que je parle Thai hein, mais il y a des choses comme ça qu'on comprend sans avoir besoin des mots. On reprend le bateau pour faire une balade sur le lac, voir quelques singes faire des galipettes et le soleil se coucher. Impression décidément tenace d'être au paradis.

Au dîner, on mange un poisson fraîchement pêché dans le lac et délicieusement grillé. Le tout accompagné d'une petite sauce au piment toute bête, dont je note la recette. Nopporn nous demande si on veut plutôt passer deux ou trois jours dans la jungle, et après une concertation éclair, on opte pour trois. Couchés au dessus de l'eau à regarder les étoiles, on discute un peu avant de céder à la fatigue.

Silent Alarm

Haut-parleur, Müggelsee, Berlin, août 2009

We sit and we sigh
And nothing gets done
So right, so clued-up
We just get old

And all the while
Been torn asunder

Nicotine
And bacteria

What are we coming to
What are we gonna do

PIL #65 Silent Alarm

mardi, octobre 19 2010

Ayutthaya 19

Ayutthaya, Thailande, octobre 2009

Levés aux aurores (huit heures du matin, c'est inhumain), on petit déjeune à la guest house. On file ensuite vers les ruines de la vieille ville d'Ayutthaya, histoire d'en profiter un peu avant que le soleil ne nous transforme en homards. On commence doucement en faisant une longue promenade sur le site du Wat Phra Sri Sanphet, suivie de la visite d'un temple moderne histoire de nous rafraîchir. On regarde de loin le Wat Phra Ram en regrettant de ne pas pouvoir y mettre les pieds, et on traverse les jardins de l'ancien palais royal. On joue à Indiana Jones dans les ruines du Wat Mahathat, où une tête de Bouddha s'est faite emprisonner dans les racines d'un arbre. Morts de soifs, on s'arrête acheter de l'eau et des éventails, dont il ne subsistera plus rien quelques heures plus tard.

On finit notre visite avec le Wat Ratchaburana, que je parcours de long en large avec mon appareil photo et l'opéra de Carl Orff en boucle dans la tête (c'est très agaçant quand ça arrive). Il nous faut quelques longues minutes en plein cagnard avant de nous réorienter et de trouver un taxi qui nous dépose en ville. On flâne entre les étals d'un petit marché, avant de filer dans une banque climatisée (bonheur) pour retirer un peu d'argent. Retour à la guest house, élue meilleur restaurant du coin. On s'installe peinards au bord du fleuve et on dévore.

Ayutthaya, Thailande, octobre 2009

L'après-midi est maintenant bien entamée, et on part pour la gare où on s'achète des billets de train extrêmement chers pour Bangkok (20 bahts, soient 50 centimes d'euro). À ce prix là évidemment, on voyage debout en troisième classe, mais il n'y a pas grand chose qui puisse entamer notre bonne humeur. On arrive à la gare de Bangkok quelques heures plus tard, et au moment où on met le pied à terre tout le monde se fige. Les hauts parleurs de la gare entonnent l'hymne national, et tout le monde observe un silence religieux. Il ne nous reste plus qu'à attendre le train suivant - celui qui doit nous conduire dans la jungle.

Comme on est un peu en avance, je vais m'acheter des brochettes et des saucisses fourrées au fromage, histoire de ne mourir ni bête ni de faim. Les autres me regardent bizarrement, visiblement il est inconcevable que je sois encore capable d'avaler un truc sans exploser. Ils vont néanmoins se chercher un café frappé quelques minutes plus tard. L'heure arrive de monter dans le train, et cette fois on est en classe grand luxe. Le contrôleur nous apporte le menu, devant lequel on salive copieusement. Il nous propose de la bière, qu'on accepte, et il arrive avec un sceau rempli de glaçons et 3.5L de Singha. Avec les canettes qu'on avait achetées en prévision du voyage, on devrait avoir de quoi voir venir. Quand le repas arrive on lui fait une petite place dans nos estomacs respectifs et l'univers se dilate un peu plus.

Ayutthaya, Thailande, octobre 2009

La bière et la fatigue font assez vite leur oeuvre, et on part dans des discussions improbables sur fond de Tryo - c'est du roots :
- Ce qui est bien, c'est qu'on n'a pas de rail de notre côté
- On n'a pas de rail, mais on a de la pop...
- Ouais et pas de rail, pas de chocolat
- Plus on est de de fous, moins y'a de rails
- Si on était à cheval, on serait montés sur du rail-selle
- Vous croyez qu'on aura un bol de rail au petit déjeuner ?

Le contrôleur passe nous demander si on veut encore de la bière, et on refuse poliment dans un anglais imbibé. F. et L. vont fumer une dernière cigarette à l'arrière du wagon ; je les rejoins en me tenant aux parois et constate qu'on roule toutes portes ouvertes. Je grimpe ensuite dans ma couchette, tire le rideau avant de m'endormir, bercé par le vrombissement régulier d'un ventilateur.

lundi, octobre 18 2010

Ayutthaya 18

Ayutthaya, Thailande, octobre 2009

Le temps file bien trop vite ; j'ai à peine eu le temps d'apprivoiser un petit bout de Bangkok qu'on part déjà vers d'autres contrées. Malgré tout, on est tous excités à l'idée d'aller voir les ruines d'Ayutthaya. On se rend en taxi à la gare routière, d'où on saute dans un bus grand confort. Je prolonge un peu ma nuit, avant de profiter du paysage qui défile par la fenêtre. En arrivant, on chope un tuk-tuk jusqu'à la guest house où on prend nos quartiers. Il fait très chaud, on a tous bien faim et pas mal la flemme ; on s'installe donc en terrasse et on commande à manger.

Du repas, on ne garde qu'un souvenir, indélébile : on n'a jamais mangé un aussi bon poulet cajou. Et pourtant, à nous tous on commence à en avoir un certain nombre au compteur. On se demande si on kidnappe le personnel en cuisine tout de suite ou demain, mais on a tellement bien mangé et bu qu'on va se planquer à l'ombre pour faire une sieste avant d'avoir pris une décision. Au réveil, on se retrouve sur le balcon en teck. On décide qu'on est quand même pas mal du tout là, et qu'il fait bien trop chaud pour aller visiter quoi que ce soit. On descend des bières en regardant passer le liseron d'eau sur le fleuve.

Ayutthaya, Thailande, octobre 2009

En fin d'après midi, la température a suffisamment baissé pour qu'on envisage d'aller se promener un peu. On se dirige vers un petit Wat mignonnet où on nourrit quelques énormes poissons-chats après avoir payé hommage au Bouddha local. On file ensuite vers un marché de nuit, profitant de l'ambiance et de la fraîcheur du soir. Avant de nous dire que ça fait longtemps qu'on n'a rien englouti de solide, et qu'on mangerait bien.

Ayutthaya, Thailande, octobre 2009

Pour une fois, on ne va pas manger Thai. On trouve une steak house locale recommandée par un de nos guides, où je mange une soupe (logique). L. prend un Phad Thai (lalala) qui va s'avérer atroce, et seul P. opte pour un steak façon truc, a posteriori le choix le plus raisonnable de la carte. Un peu déçus par ce repas, on hésite à retourner manger un poulet cajou à la guest house. Finalement on opte pour une bière fraîche, et on finit la soirée à regarder des Thais descendre plusieurs bouteilles d'alcool de riz. Une bonne, vraie journée de vacances, en somme.

dimanche, octobre 17 2010

Bangkok 17

Bangkok, Thailande, octobre 2009

Ce matin, P. et moi allons chez le tailleur pour nous faire faire des costumes et des chemises sur mesure. Direction Sukhumvit par le Sky Train ; on s'arrête dans l'énorme complexe commercial Emporium - qu'on finit assez rapidement par fuir, impatients d'en découdre avec notre objectif du matin. La séance de mesure est assez rapide, et on prend rendez-vous l'après-midi même pour faire un pré-essayage, histoire de vérifier qu'on part sur les bonnes bases.

Malgré l'efficacité du tailleur, on a perdu pas mal de temps en transports et il est temps d'aller déjeuner. Ce qui nous réjouit toujours, au demeurant - si on pouvait manger 24/7 on ne se priverait pas. On se dirige donc tranquillement vers Phat Pong, et on se pose au Mango Tree. P. demande des crevettes crues ; le serveur lui indique qu'elles sont vraiment crues, on fait genre on n'est pas des touristes, bring it on. On est à l'ombre en terrasse, mais on sue un peu sous le soleil de plomb. Je demande une bière Kloster, que John Burdett prétend infiniment supérieure à toutes les autres, mais ils n'en ont pas. Je me replie sur une Singha, que le même auteur compare à de la pisse d'âne, et je me dis qu'il abuse grave.

Bangkok, Thailande, octobre 2009

A la fin du repas, on repart chez le tailleur avec P., tandis que F. et L. vont lézarder avec les varans au parc du Lumphini. On est un peu jaloux, mais c'est le prix à payer pour pouvoir parader dans nos beaux vêtements à notre retour en Europe. Et puis on est en vacances, on a le temps de prendre le temps. L'essayage prend trois secondes chrono, et on se dit qu'on va essayer le métro pour changer du BTS. Ledit métro est hyper moderne, et utilise des jetons RFID en guise de tickets. On se dit qu'on va prendre les escaliers en sortant, ça nous fera digérer l'orgie du midi. Et puis on est sportifs oui ou merde ?

Merde. Quelques milliards de marches plus tard, on émerge du métro avec des crampes, quelques kilos en moins et une dalle de l'espace. On se dit que plus jamais, et on retrouve les autres dans le parc, où on se plante devant une foule de Thaïs disciplinés en train de faire de l'aérobic en plein air. Avant de repartir vers le Vertigo Bar, d'où on rêve de pouvoir admirer le coucher de soleil en sirotant des cocktails. Une fois arrivés au 61e étage, on s'accorde un instant pour reprendre notre souffle : Bangkok vu du ciel c'est la grande classe.

Bangkok, Thailande, octobre 2009

Malgré tout, j'ai pris cher aujourd'hui et je suis tout faible. Je commande un Bloody Mary en guise de transfusion, et commence à mitrailler et constituer des panoramas. Avant de bricoler un pied pour l'appareil et de faire des photos de nos bouilles réjouies, au sommet du monde sous les étoiles. La nuit tombe, et on laisse notre place pour aller voir des matches de Boxe Thaï au Lumphini Stadium. On arrive bien trop tôt, et on se pose au milieu de la foule de vendeurs avec une boisson fraîche. On discute de ce qu'on va voir, je préviens que je m'évanoui rien que de penser à du sang, et on me répond, l'air taquin, de ne pas m'en faire, que les bancs sont confortables.

Le premier match commence et on s'apperçoit qu'il n'y aura que des combats de jeunes Thaïs. C'est un peu perturbant de voir des gamins se taper dessus de la sorte, mais on se laisse assez vite prendre par le spectacle. J'essaie vainement de capturer l'ambiance avec mon appareil photo, mais il y a toujours une corde mal placée sur laquelle mon boitier fait sa mise au point. Un peu frustré, je finis par laisser tomber pour en profiter un peu. P. est un peu déçu de ne voir aucun combat d'adultes, plus violents et francs du collier. Je me dis qu'au moins je ne m'évanouirai pas ce soir. Une fois le tournoi terminé, on va manger un morceau. Juste au moment de régler, le ciel se déchaîne et la rue se transforme en Khlong. On saute dans un taxi en direction de l’Amari Watergate, qui ce soir porte vraiment bien son nom.